Danse: ONE SHOT de Ousmane Sy

Hommage vibrant au chorégraphe Ousmane Sy avec la représentation de sa dernière création : « One Shot » dans le cadre du Festival Suresnes cités danse. Une épopée où les femmes y sont les héroïnes.

« One Shot » voit le jour dans un contexte singulier au printemps 2020, en plein confinement. Une singularité que l’on retrouve dans une création qui se veut être le manifeste d’une fureur de vivre par la danse à l’heure où notre salon n’est plus que la seule piste de danse autorisée. Le ton est donné avec un casting exclusivement féminin et résolument puissant. Issues de la compagnie Paradox-sal, fondée par Ousmane Sy en 2012, avec en invitée Linda Hayford du collectif FAIR[E], (à la tête du Centre chorégraphique national de Rennes et de Bretagne), les performeuses se partagent la scène pour y affirmer leur unicité par ce langage universel qu’est la danse, enrichit de multiples influences de la house à l’afrobeat. Une soirée qui s’annonce riche en surprises et en émotions pour cette 29e édition du Festival.

Ousmane Sy et le festival suresnois relèvent d’une histoire de cœur longue de 20 ans. Le chorégraphe y décroche, en effet, son premier contrat professionnel dans le spectacle Macadam, Macadam, de Blanca Li qui scelle son amitié avec Olivier Meyer, directeur du Théâtre de Suresnes.

Distribution
Avec Emilie Bataille, Allauné Blegbo, Selasi Dogbatse, Valentina Dragotta, Nadia Gabrieli Kalati, Cintia Gotilin, Linda Hayford, Anaïs Imbert-Cléry, Odile Lacides, Cynthia Lacordelle, Audrey Minko, Stéphanie Paruta, Marina De Remedios

Chorégraphie Ousmane Sy
Musique DJ Sam One
Création lumières Xavier Lescat
Son et arrangements Adrien Kanter

Mentions de production
Commande et production Théâtre de Suresnes Jean Vilar / festival Suresnes cités danse 2021
Production déléguée CCNRB
Avec le soutien de Cités danse connexions et All 4 House
Résidence Théâtre de Suresnes Jean Vilar.

Avec France 3.

Guerre d’Algérie

Ce qu’il faut retenir du rapport Stora remis aujourd’hui à Emmanuel Macron. Commandé en juillet dernier par l’Elysée pour réconcilier les mémoires autour de la colonisation et la guerre en Algérie, le rapport de l’historien Benjamin Stora est remis mercredi à Emmanuel Macron.

Source: France Info

L’historien Benjamin Stora, spécialiste reconnu de l’histoire contemporaine de l’Algérieremet mercredi 20 janvier dans l’après-midi au président de la République Emmanuel Macron le rapport que ce dernier lui avait commandé en juillet pour “dresser un état des lieux juste et précis du chemin accompli en France sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie”. Si Emmanuel Macron a d’ores et déjà exclu de présenter des excuses ou se repentir, il devrait suivre, selon l’Elysée, l’essentiel des préconisations du rapport. Emmanuel Macron candidat à l’élection présidentielle avait déclenché la polémique en France en qualifiant la colonisation en Algérie de “crime contre l’humanité”.

Ces propos, il ne les regrette pas, précise l’Elysée. “Emmanuel Macron entend regarder l’histoire en face” pour construire une mémoire commune et apaisée, explique-t-on rue du Faubourg Saint-Honoré. Mais il n’y aura pas d’excuse, comme le réclame le gouvernement algérien, pas de repentance. “La repentance est une vanité. La reconnaissance est une vérité. La vérité est dans les actes”, assène l’Elysée. Outre la panthéonisation de Gisèle Halimi, avocate, militante et opposante à la guerre d’Algérie, Benjamin Stora propose une trentaine de préconisations.

Davantage commémorer

Pour impulser une dynamique d’initiatives commune entre la France et l’Algérie, Benjamin Stora propose de constituer une Commission “Mémoires et vérité”, chargée notamment de recueillir la parole des survivants de la guerre, des deux côtés de la Méditerranée. Il invite par ailleurs à poursuivre les commémorations, comme celle du 19 mars 1962, qui avait été demandée par plusieurs associations d’anciens combattants à propos des accord d’Evian, premier pas vers la fin de la guerre d’Algérie. Parmi les autres propositions de commémorations, il propose par exemple la date du 25 septembre, journée d’hommage aux harkis, ou encore celle du 7 octobre 1961 épisode de répression des travailleurs algériens en France. L’historien propose en outre la construction d’une stèle en hommage à l’Emir Abdelkader, au moment du 60e anniversaire de l’indépendance de l’Algérie en 2022, et de restituer son épée à l’Algérie.

Honorer la mémoire des morts

Il s’agira aussi, pour Benjamin Stora, d’honorer la mémoire de ceux qui ont perdu la vie lors de la guerre. En reconnaissant, par exemple, l’assassinat d’Ali Boumendjel, avocat, ami de René Capitant, militant du FNL, assassiné pendant “la Bataille d’Alger” de 1957. Il propose aussi de publier un “Guide des disparus” de la guerre d’Algérie, algériens et européens, et d’intensifier l’identification des emplacements où furent inhumés les condamnés à mort exécutés pendant la guerre. Cela permettrait à l’Algérie, explique-t-il dans son rapport, de poursuivre les démarches entreprises à la fin des années 1960 pour récupérer les corps des Algériens morts en France pendant la guerre.

L’auteur du rapport préconise par ailleurs de faire des quatre camps d’internement situés sur le territoire français des lieux de mémoire. À partir de 1957, des milliers d’Algériens ont ainsi été internés administrativement en France dans le camp du Larzac (Aveyron), celui de St-Maurice l’Ardoise (Gard), celui de Thol (Rhône) et celui de Vadenay (Marne). Il propose d’apposer des plaques à proximité de chacun de ces camps pour rappeler leur histoire.

Renforcer la coopération France-Algérie

Comme condition à l’apaisement, Benjamin Stora pose la condition nécessaire d’une coopération renforcée entre la France et l’Algérie. Ainsi propose-t-il d’achever les travaux du comité mixte d’experts scientifiques algériens et français chargés d’étudier les restes humains de combattants algériens du XIXème siècle conservés au Muséum national d’Histoire naturelle. Il préconise que la France et les autorités algériennes facilitent les déplacements des harkis et de leurs enfants entre les deux pays.

Faciliter le travail d’archive

Il s’agira aussi, selon Benjamin Stora, de faire la lumière sur les enlèvements et assassinats d’Européens à Oran en juillet 1962, et entendre la parole des témoins de cette tragédie. Une commission mixte d’historiens français, et algériens pourrait en être chargée. Benjamin Stora invite aussi à la déclassification des documents “secrets” déjà archivés antérieurs à 1970. Des facilités de visas et des bourses pourraient être proposées à des étudiants en thèse algériens pour qu’ils effectuent des recherches dans les fonds d’archive en France, et faire bénéficier des étudiants français du même régime en Algérie. Enfin, le spécialiste reconnu de l’histoire contemporaine de l’Algérie invite à la création d’une collection “franco-algérienne” dans une grande maison d’édition pour favoriser la diffusion des travaux des historiens.

Mieux enseigner la période aux jeunes

Il s’agira, selon le rapport, d’accorder, dans les programmes scolaires, plus de place à l’histoire de la France en Algérie. Ainsi, en plus de ne plus traiter de la guerre sans parler de la colonisation, le rapport propose de généraliser cet enseignement à l’ensemble des élèves, y compris dans les lycées professionnels. Un office franco-algérien de la Jeunesse, chargé principalement d’impulser les œuvres de jeunes créateurs, pourrait être créé.

Autres préconisations

Parmi les autres préconisations de Benjamin Stora figurent une invitation à donner à des rues de communes françaises des noms de personnes issues de l’immigration et de l’outre-mer, et inscrire des noms de Français particulièrement méritants, en particulier médecins, artistes, enseignants, issus de territoires antérieurement placés sous la souveraineté de la France. Il préconise aussi l’organisation d’une grande exposition sur les mouvements d’indépendance  et d’un colloque sur le refus de la guerre. Enfin, le spécialiste de l’histoire algérienne propose de créer une commission franco algérienne d’historiens chargée de d’établir l’historique du canon “Baba Merzoug” ou “La Consulaire”, qui se trouve actuellement à Brest après avoir été rapporté d’Alger en 1830, et formuler des propositions partagées quant à son avenir, “respectueuses de la charge mémorielle qu’il porte des deux côtés de la Méditerranée”.

Mémoire franco-algérienne : à Alger, l’opinion demande une réparation à l’écart des récupérations officielles

Dans les rues de la capitale de l’Algérie, nombreux sont ceux qui pensent qu’une véritable réconciliation passe par des « excuses » de la France.

Par Safia Ayache(Alger, correspondance)

Source: Le Monde

« Les excuses, ils peuvent les garder, pour moi ça ne veut rien dire. Moi aussi je peux tuer quelqu’un et réclamer le pardon. Est-ce que vous l’accepteriez, vous ? Non, il faut des réparations financières et morales », lâche tout de go Mohamed, un natif de Constantine, plus grande ville de l’Est algérien.

Ce sexagénaire dont la famille paternelle a vécu à Tébessa, dans l’extrême est de l’Algérie, reste marqué par l’histoire d’un oncle qu’il n’a pas connu. « Le petit frère de mon père est mort à l’âge de 10 ans quand il a explosé sur une mine à Tébessa. Il croyait que c’était un jouet, elle lui a éclaté à la figure. C’est mon autre oncle qui l’a pris sur ses épaules. Ils l’ont amené à l’hôpital mais c’était trop tard, il avait perdu trop de sang », raconte Mohamed.

L’histoire remonte aux années 1950, en pleine guerre d’Algérie, quand la France a installé des lignes de défense, baptisées lignes Morice et Challe, le long de la frontière algéro-tunisienne. A l’époque, l’armée française a posé des millions de mines antipersonnel et d’engins explosifs sur une distance de 460 kilomètres, entre Annaba et Tébessa. L’objectif ? Mettre fin à l’infiltration de combattants algériens, chargés notamment du ravitaillement en armes des maquis intérieurs, depuis les bases arrière tunisiennes de l’Armée de libération nationale.

Selon les autorités algériennes, ces engins explosifs ont fait 4 830 victimes durant la guerre d’Algérie et près de 2 500 autres entre 1962 et 2017, date à laquelle le déminage des zones concernées s’est achevé. Il aura fallu attendre 2007 pour que la France remette aux autorités algériennes la cartographie des mines antipersonnel.

Indemniser les victimes

Du côté sud de la Méditerranée, la question mémorielle revêt toujours une importance significative. Pour certains Algériens, son règlement passe par la présentation d’excuses officielles. « C’est un impératif et je dirais même que ça n’a que trop tardé, après soixante ans d’indépendance », estime Achwak*. Cette trentenaire, qui travaille dans l’édition, est installée à la terrasse d’un café face à l’imposante Grande Poste d’Alger, un édifice néomauresque près duquel les partisans de l’Algérie française se réunissaient régulièrement lors des crises politiques qui ont marqué la fin de la période coloniale.

« Les excuses apaiseront les esprits, mais il y a aussi la question des victimes des essais nucléaires de Reggane [menés entre 1960 et 1966 dans le Sud algérien], qui endurent encore des séquelles. Il faudrait qu’elles soient indemnisées », ajoute Achwak. Sans cela, l’Algérie et la France ne pourront jamais « ouvrir une nouvelle page, poursuit-elle. Ça se transmet de génération en génération. Si quelqu’un a un père qui a été victime, alors il vivra toujours avec ce préjudice porté à l’un de ses parents », soutient la jeune femme.

Pour Mohamed, la question de l’indemnisation des victimes est aussi primordiale. « Les familles des juifs déportés durant la seconde guerre mondiale ont obtenu des réparations financières. Nous attendons la même chose afin que la France sache que la guerre a un coût. »

Mais « si indemnisation il y a, il faudrait qu’elle soit directement octroyée aux victimes », explique Ameur*, un entrepreneur de 27 ans dont les locaux sont situés à deux pas de la présidence algérienne. « Indemniser les victimes des radiations nucléaires, c’est le minimum. Mais ils ne devraient rien donner à l’Etat », poursuit Ameur. Sa famille aussi a été marquée par la guerre d’indépendance algérienne. « Mon père est fils de chahid [martyr], ça l’aiderait de voir que la France reconnaît les faits, mais il n’a pas de ressentiment. Maintenant, nous en sommes à la troisième génération, il faut fermer ce chapitre et aller de l’avant. »

Instrumentalisation

Face à lui, son ami Smail*, 23 ans, ne considère pas les excuses comme un préalable à la réconciliation entre les peuples algérien et français. « La population doit se concentrer sur les relations économiques et non historiques. Pour ce qui est de la mémoire, c’est une question populiste que nos leaders utilisent pour avoir plus de soutien », explique ce jeune diplômé en science politique.

Ameur et Smail, tous deux engagés dans un parti politique d’opposition, pensent que les pouvoirs successifs ont toujours instrumentalisé la question mémorielle. « A l’époque de Bouteflika [l’ancien président chassé du pouvoir en 2019 par le mouvement de protestation populaire du Hirak], les autorités travaillaient déjà sur la récupération des crânes [de résistants à la colonisation tués par les Français dans les années 1840 et 1850, longtemps conservés à Paris], donc ce n’est pas Tebboune qui a demandé et obtenu leur restitution. Mais il l’a bien utilisée pour gagner en légitimité. »

Le chef de l’Etat algérien, Abdelmadjid Tebboune, élu en décembre 2019 dans un climat de contestation que seule la pandémie de Covid-19 a pu atténuer, était présent lors de l’inhumation officielle des 24 crânes restitués par la France. La cérémonie, retransmise en direct à la télévision nationale, a été organisée le 5 juillet dernier, date de la fête d’indépendance.

« Il utilise l’histoire algérienne. C’est aussi pour cela qu’il a choisi le 1er novembre [jour férié marquant le déclenchement de la guerre d’indépendance] comme date symbolique pour faire passer sa Constitution. La récupération a toujours été là chez les putschistes, incluant Boumédiène [figure de la guerre d’indépendance devenue chef du gouvernement puis président de la République]. Tous ces éléments du FLN [Front de libération nationale, ancien parti unique] ont récupéré l’histoire algérienne pour le culte de leur personnalité, pour leurs propres intérêts et non celui du peuple algérien », tranche Mohamed.

Pour sa part, Achwak reste confiante dans la lucidité du peuple algérien. « Le jour où on a rapatrié les crânes, les gens se sont exprimés pour dire que ce n’est pas une faveur qui nous a été faite. La mémoire est collective, elle n’appartient pas à untel ou untel ni au gouvernement. »

Pourquoi l’enseignement de l’arabe à l’école est-il si polémique?

Publié le 18/10/2020 – Source: France Info

La proposition d’Emmanuel Macron d’encourager l’apprentissage de cette langue souvent perçue comme celle du Coran dans le cadre périscolaire a réveillé de vieilles crispations à droite et à l’extrême droite.

Une idée “ridicule” dénoncée par l’ancien ministre de l’Education, Luc Ferry. “Une lâcheté et une faute” , selon les mots du député LR Aurélien Pradié. “Une honte”, s’est emporté Steeve Briois, le vice-président du Rassemblement national. La proposition d’Emmanuel Macron de renforcer l’apprentissage de l’arabe à l’école a fait bondir dans les rangs de la droite conservatrice et de l’extrême droite. Lors de son discours sur le “séparatisme islamiste”, vendredi 2 octobre, le chef de l’Etat a plaidé pour “enseigner davantage la langue arabe à l’école, dans un périscolaire que nous maîtrisons” car “notre jeunesse est aussi riche de cette culture plurielle”.

L’idée d’Emmanuel Macron n’est pourtant pas nouvelle. Pas plus que l’emballement qu’elle suscite. “Politiquement, la question de l’enseignement de l’arabe est très difficile à porter”, décrypte Françoise Lorcerie, sociologue à l’Institut de recherches sur le monde arabe et musulman de l’université Aix-Marseille. En 2018, le ministre de l’Education, Jean-Michel Blanquer, a également déchaîné les passions, en se montrant prêt à favoriser l’apprentissage de cette “très grande langue littéraire” pour lui “donner du prestige”. Nicolas Dupont-Aignan, président du parti Debout la France, y voyait alors une tentative d’“arabisation de la France”.

Des cours suivis par 0,3% des élèves

“Rendre obligatoire l’arabe dès le primaire, c’est non”, avait quant à lui lancé le président de la région Hauts-de-France, Xavier Bertrand, prêtant au gouvernement cette intention, alors même que Jean-Michel Blanquer n’avait évoqué aucun caractère obligatoire.

En 2016, la ministre Najat Vallaud-Belkacem s’était elle aussi attirée les foudres d’une partie de la classe politique, après avoir proposé de réformer les cours facultatifs de langue Elco dans le primaire, assurés par des enseignants envoyés et rémunérés par les pays partenaires du dispositif. La socialiste souhaitait les remplacer par des sections internationales, accessibles aux écoliers volontaires, mais dont les enseignements seraient cette fois dispensés par des assistants de langue de l’Education nationale. La polémique s’était alors immédiatement cristallisée sur l’arabe. La députée LR Annie Genevard avait alors fustigé “l’introduction de langues communautaires” dans les programmes scolaires et estimé que l’enseignement de l’arabe pourrait miner la “cohésion nationale”, allant même jusqu’à évoquer un “catéchisme islamique”.

Si l’enseignement de cette langue provoque régulièrement des levées de boucliers jusque dans l’Hémicycle, son apprentissage à l’école reste en fait très limité. Dans le secondaire, 14 900 collégiens et lycéens suivaient des cours d’arabe à la rentrée 2019, selon le ministère de l’Education nationale, sur un total de plus de 5,6 millions d’élèves. Soit près de 0,3% des élèves. La tendance est toutefois à l’augmentation, puisqu’ils étaient 6 512 à étudier l’arabe à la rentrée 2007, relève Le Monde. En troisième langue au lycée, l’arabe a été choisi par 3 834 élèves à la rentrée 2019, loin derrière l’italien (33 969 élèves) ou encore le chinois (17 463 élèves), selon les données mises en ligne par le ministère.

Des réticences sur le terrain

Dans le premier degré, la pratique de l’arabe comme langue vivante étrangère est encore plus marginale. Environ 0,1% des élèves l’ont choisie (contre 96,4% pour l’anglais). En 2016, selon l’Education nationale, quelque 48 000 élèves du primaire suivaient par ailleurs des cours d’arabe dispensés en partenariat avec l’Algérie, le Maroc et la Tunisie, en dehors du temps scolaire, via le dispositif Elco. Des chiffres qui restent relativement bas au regard des plus de trois millions de personnes arabophones en France, selon le ministère de la Culture.

De faibles effectifs qui peuvent en partie s’expliquer par des réticences sur le terrain à ouvrir des classes d’arabe, explique Nabil Wakim, auteur de L’Arabe pour tous (éd. Seuil)un ouvrage dans lequel il s’interroge sur le “tabou” autour de la langue arabe en France. Le journaliste y évoque la difficulté à convaincre les recteurs, les chefs d’établissement et l’ensemble du corps enseignant “que c’est une bonne idée d’avoir une classe d’arabe”. 

Il y a des chefs d’établissement, voire des enseignants, qui ne veulent pas enseigner l’arabe dans leur lycée, parce que ça va être perçu comme enseigner l’islam.

Nabil Wakim 

Et lorsque des classes sont ouvertes, reste à persuader les parents d’y inscrire leurs enfants. Dans son enquête, Nabil Wakim montre notamment que certaines familles issues de l’immigration renoncent à cette possibilité “à cause de cette mauvaise image de la langue”“Le discours qui dévalorise l’enseignement de l’arabe participe à donner le sentiment à ces populations qu’elles sont mal vues, qu’elles n’ont pas leur place dans la société”, déplore de son côté la sociologue Françoise Lorcerie.

Un débat français

Dans certains cursus de l’enseignement supérieur, l’apprentissage de l’arabe est en revanche valorisé. “Dans les grandes écoles, comme Sciences Po, il y a des questions de distinction et d’utilitarisme qui jouent dans la pratique de l’arabe”, analyse Françoise Lorcerie. Mais les cours y sont “très majoritairement suivis par des étudiants qui n’ont pas de lien avec le monde arabe, et qui apprennent l’arabe comme une langue d’élite”, ajoute Nabil Wakim. L’enseignement de la langue souffrirait donc d’un double standard, explique Nada Yafi, directrice du centre de langue et de civilisation arabes de l’Institut du monde arabe (IMA).

A l’université, l’arabe est une filière d’excellence alors qu’à l’école primaire et dans le secondaire, cette langue suscite la crainte.

Nada Yafi 

Mais d’où vient cette “crainte” ? Ce rapport complexe à l’arabe est une spécificité française, pointe Nada Yafi, qui assure que “dans les autres pays européens, la langue ne fait pas débat et ne génère pas de crispations”“Derrière le débat d’idées, on voit se profiler des passions inavouées, de vieilles blessures. Celle d’une guerre d’Algérie non assimilée. Celle de l’orgueil national inconsolable à la perte d’un vaste empire”, écrit-elle dans un article pour le média L’Orient XXI. 

Quand on évoque l’enseignement du chinois, par exemple, ça ne traîne pas les mêmes relents coloniaux et post-coloniaux, toutes ces passions que charrie la langue arabe.

Françoise Lorcerie 

Difficile par ailleurs de prôner l’apprentissage de l’arabe, dans un pays où “historiquement la langue française a été motrice dans la construction de l’identité nationale”, ajoute Nada Yafi. D’où l’argument régulièrement avancé par les opposants à l’enseignement de l’arabe à l’école qui estiment que celui-ci se ferait nécessairement au détriment de la maîtrise du français. “Le problème, c’est aussi cette vision monolingue de l’espace linguistique, estime Nada Yafi. La société actuelle ne fonctionne plus comme cela.”

Une langue associée à la religion

Si l’enseignement de l’arabe est source de polémiques, c’est aussi car la langue est régulièrement associée à la religion dans le débat public. “Il y a une grande confusion qui est entretenue, volontairement par certains, par ignorance pour d’autres, entre le monde arabe et le monde musulman”, avance Nabil Wakim. Il en résulte que la langue arabe est souvent d’abord présentée comme celle du Coran.

Ecrire, lire, parler en arabe, ce serait d’abord voir le monde aux couleurs de l’islam et du Coran.

Nabil Wakim dans “L’Arabe pour tous”

Or, la langue a préexisté au Coran, rappelle le journaliste. Une association également perçue comme “bancale”, selon Nada Yafi, car “la majorité des musulmans dans le monde ne parlent pas arabe et les habitants du monde arabe ne sont pas tous musulmans”.

En outre, ces dernières années, l’enseignement de l’arabe est régulièrement abordé dans la sphère publique à travers le prisme des questions liées au communautarisme ou à l’islamisme. Un rapprochement qui a notamment été formulé dans deux rapports de l’Institut Montaigne, l’un publié en 2016, l’autre en 2018. L’auteur de ces deux textes, l’essayiste Hakim El Karoui, y préconise de “mobiliser le ministère de l’Education nationale” pour “relancer l’apprentissage de la langue arabe” afin de lutter contre le radicalisme islamiste, et limiter la pratique des cours de langue à la mosquée “devenus pour les islamistes le meilleur moyen d’attirer des jeunes”.

Avec cette rhétorique, “on ne favorise pas l’enseignement de l’arabe pour des raisons culturelles et intellectuelles mais pour lutter contre une peur et ça, c’est un fait nouveau”, analysait l’historien de l’éducation, Claude Lelièvre, auprès de 20 Minutes, au moment de la publication du second rapport. “Même s’il part d’une bonne intention, ce texte ne fait qu’envenimer la polémique en renforçant l’association entre la langue et la religion, écrivait encore Nada Yafi. Il en découle l’idée selon laquelle la langue arabe recèlerait en elle-même des dangers.”

Dédiaboliser l’arabe

Enseigner l’arabe à l’école pour freiner son apprentissage dans les mosquées et les associations, c’est l’argumentaire repris par Emmanuel Macron, qui a par ailleurs choisi d’inscrire cette proposition dans son discours sur “la lutte contre les séparatismes”. “Quand nous n’enseignons pas [l’arabe] à l’école, nous acceptons que plus de 60 000 jeunes aillent l’apprendre dans des associations pour le pire et qui sont manipulés”, a lancé le chef de l’Etat. 

“Le problème avec l’enseignement de l’arabe dans les mosquées n’est pas tant que ça transforme des jeunes en fondamentalistes dangereux, mais qu’ils apprennent mal l’arabe”, a de son côté constaté Nabil Wakim au cours de son enquête. Pour le journaliste, l’arabe enseigné à partir des textes religieux est différent de l’apprentissage d’une langue vivante qui permet de vivre collectivement, d’acheter du pain à la boulangerie ou de trouver du travail”.

Dire que l’apprentissage de l’arabe est un antidote à un problème, c’est lui faire jouer le mauvais rôle.

Nada Yafi 

Pour apaiser le débat autour de l’enseignement de l’arabe à l’école, Nada Yafi estime qu’il faut cesser de percevoir cette langue comme un rempart contre le communautarisme. “Les langues ne peuvent être réduites au rôle de marqueur identitaire. Elles sont aussi une clé de réussite, un passeport pour la mobilité”, avance la directrice du centre de langue et de civilisation arabes de l’Institut du monde arabe. “Il faut arrêter de diaboliser l’arabe, de dévaloriser cette langue et de voir en elle un problème”, conclut Françoise Lorcerie.

Corridas aux arènes de Bayonne

Le tribunal de Bayonne rejette l’interdiction des corridas demandée par la SPA. La Société protectrice des animaux espérait que le cas de Bayonne pourrait créer une jurisprudence et mettre fin aux corridas en France.

Par Michel Garicoïx – Publié le 19 novembre 2020 à 12h47

Source: Le Monde

Le tribunal correctionnel de Bayonne a rejeté, mardi 17 novembre, la plainte déposée par la Société protectrice des animaux (SPA) contre les organisateurs de corridas dans cette ville. Ayant engagé plusieurs actions contre des villes taurines, telles Dax, Carcassonne, Béziers ou Nîmes en raison de « sévices graves ou acte de cruauté envers un animal », la SPA espérait que le cas de Bayonne pourrait créer une jurisprudence et mettre fin aux corridas en France.

Lors des débats, le 10 septembre, les défenseurs de la cause animale avaient fait valoir que la corrida est une pratique cruelle, majoritairement réprouvée par l’opinion publique. « Soixante-dix pour cent des personnes interrogées sont contre la corrida », avait pointé Nicolas Huc-Morel, l’avocat de la SPA. Pour appuyer sa demande, l’avocat avait également mis en avant la loi Grammont de 1850 réprimant les sévices à l’encontre des animaux domestiques, à un moment où sont également contestés, en France, les animaux dans les cirques ou les delphinariums.

« C’est une exacte application de la loi, telle qu’elle avait été déterminée par la Cour de cassation, le conseil d’Etat et le Conseil constitutionnel [en 2012], et nous sommes satisfaits de cette lecture », avait rétorqué Philippe Moriceau, le défenseur d’Alain Lartigue, le mandataire des arènes de la ville et de l’ex-torero Juan Bautista (Jean-Baptiste Jalabert) assignés à la suite d’une corrida dans l’enceinte bayonnaise de Lachepaillet. Jean-René Etchegaray, le maire de Bayonne, était lui assigné pour « complicité ».

Une culture affirmée au fil des siècles

Si l’article 521-1 du Code pénal sanctionne les actes de cruauté envers les animaux, son alinéa 7 laisse par dérogation le champ libre aux corridas dans les villes où elle est une « tradition locale ininterrompue ». Mardi 17 novembre, le tribunal de Bayonne a ainsi motivé sa décision : « Force est de constater que, dans les arènes de la localité bayonnaise, la tenue régulière de courses de taureaux remonte à une époque fort ancienne et n’a jamais été interrompue, sauf pendant les guerres mondiales, si ce n’est en cette année 2020 pour cause de crise sanitaire. »

Olivier Baratchart, le directeur des arènes de Bayonne, en appelle à l’héritage romain, ainsi qu’à une culture affirmée au fil des siècles : « En 1289, on jouait déjà dans les rues à courir après vaches et taureaux, au point que s’en plaignaient les édilesPuis se sont répandus les spectacles taurins, menés alors surtout à cheval ». La « première vraie corrida moderne » a lieu dans la ville le 21 août 1853. Aujourd’hui, à Bayonne, les arènes peuvent accueillir 9 000 spectateurs payants.

L’adoption hors mariage approuvée par l’Assemblée nationale

Malgré l’opposition de la droite, l’Assemblée nationale a adopté vendredi la mesure phare d’une proposition de loi de la majorité sur l’adoption d’enfants.

Source: Le Monde avec AFP Publié le 04 décembre 2020

L’Assemblée nationale a adopté, vendredi 4 décembre, la mesure très attendue d’une proposition de loi portée par la majorité sur l’adoption d’enfants, malgré l’opposition de la droite. Cet article 2, qui autorise l’adoption plénière pour les couples pacsés ou concubins, a été voté à main levée – et sous les applaudissements – avec les voix de la majorité et de La France insoumise (LFI), mais sans celles des socialistes qui se sont abstenus et des Républicains contre. Il doit désormais être examiné par le Sénat.

Le secrétaire d’Etat à l’enfance, Adrien Taquet, a rappelé qu’actuellement, l’unique possibilité pour ces couples non mariés est que seul l’un des deux membres adopte l’enfant. « En renforçant la filiation aux deux membres du couple, on renforce les droits de l’enfant », notamment en cas de rupture du couple, a-t-il opposé aux arguments de la droite, vent debout contre la mesure d’ouverture.

« Si seul l’intérêt de l’enfant prime, alors il est préférable de lui offrir le plus de garanties possibles » et donc d’en rester à l’adoption pour les seuls couples mariés, a affirmé Thibault Bazin (Les Républicains). Son collègue Xavier Breton a critiqué une « conception » de la majorité à l’égard de l’adoption « fondée sur le désir des adultes »« La modernité on s’en fiche (…) le mariage offre une sécurité juridique que n’offrent ni le pacs, ni le concubinage », a aussi avancé, à l’extrême droite, Emmanuelle Ménard.

« Un an de vie commune »

Autre disposition cible de la droite : l’article 2 de la proposition de loi prévoit également que les adoptants devront « être en mesure d’apporter la preuve d’une communauté de vie d’au moins un an » (contre deux ans aujourd’hui) ou bien « être âgés l’un et l’autre de plus de 26 ans » (contre 28 ans).

« Un an de vie commune pour prendre une décision d’adoption, c’est un peu léger », a lancé Mme Ménard. Le secrétaire d’Etat a souligné qu’il s’agissait de « planchers » pour pouvoir demander l’agrément en vue d’une adoption, et que la moyenne d’âge des adoptants s’élevait dans les faits à 41 ans. La rapporteuse Monique Limon (LRM) a défendu la position « équilibrée » de la proposition de loi, face également à des amendements de son camp visant à encore abaisser l’âge minimal.

Principe nouveau, un écart d’âge maximal de 50 ans entre le plus jeune des adoptants et le plus jeune des enfants à adopter a été fixé, contre l’avis de députés de plusieurs bords.

Comme l’association La Manif pour tous, les Républicains jugent que le mariage offre « le plus de garanties possibles » et fustigent une « idéologie du droit à l’enfant » chez les macronistes.

Le débat sur la filiation des enfants nés par gestation pour autrui à l’étranger est revenu brièvement dans l’hémicycle. Le député de La République en marche Raphaël Gérard a déploré que « le parent d’intention doive recourir à l’adoption », et demandé de « ne pas discriminer les enfants en fonction de leur mode de conception ».

M. Taquet a répondu à ce député et à l’ex-LRM Guillaume Chiche, également en pointe sur ce sujet, qu’ils n’avaient pas « rendez-vous » pour rouvrir ce débat, déjà tranché dans le cadre de l’examen du projet de loi de bioéthique.

Un amendement pour protéger les enfants intersexes

Le député LRM Raphaël Gérard a déposé un amendement, jeudi 14 janvier, dans l’objectif de renforcer la lutte contre les mutilations sexuelles. Vingt-deux députés l’ont cosigné.

Source: Le Monde

Avec l’arrivée du projet de loi « confortant les principes républicains » à l’Assemblée nationale, le 1er février, Raphaël Gérard, député La République en marche (LRM) de Charente-Maritime, a décidé de proposer un amendement « contre les mutilations faites aux enfants intersexes », ces enfants nés avec des caractéristiques sexuelles ne correspondant pas aux classiques de la masculinité et de la féminité. Le fruit de trois ans de travail et de recherche, explique le député de Charente-Maritime. Parce que le projet de loi évoque déjà les mariages forcés ou encore les certificats de virginité, il a voulu saisir cette occasion pour effectuer « un rappel à la loi ».

Les opérations faites aux enfants intersexes ne peuvent avoir lieu pour des raisons médicales, et non esthétiques, comme le dicte l’article 16-3 du code civil. Mais, dans les faits, explique Raphaël Gérard, en France, certains médecins contournent la loi, et procèdent à des « mutilations sexuelles » afin d’attribuer un sexe féminin ou masculin à un enfant intersexe, sans son consentement. L’intersexualité représenterait un bébé sur 2 000.

Interdire les dérives

« Ça suffit, déclare le député. Un enfant intersexe ne devrait pas se faire opérer des organes génitaux sans un avis favorable lors d’une réunion de concertation pluridisciplinaire médicale. » Pour cette raison, associé à des juristes et à des associations de personnes intersexes, il a travaillé sur un amendement, qu’il a décidé de soumettre jeudi 14 janvier. Celui-ci empêcherait les médecins de recourir à une opération esthétique sous le couvert de raisons médicales sur des enfants intersexes. Vingt-deux autres députés l’ont cosigné. « On ne peut plus tolérer que des médecins décident d’opérer le clitoris de petites filles sous prétexte de favoriser leur insertion future dans la société », exprime Raphaël Gérard sur Twitter.

L’amendement stipule : « Il ne peut être porté atteinte à l’intégrité corporelle d’un mineur dans le but de conformer l’apparence de ses organes génitaux au sexe masculin ou féminin que si l’intéressé exprime personnellement sa volonté de subir une telle opération. » Avant de proposer cinq ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende comme peine encourue par les professionnels de santé.

Ces mutilations sexuelles, dit-il, qui parfois résultent « en des ablations sexuelles sur des enfants de 4 ans, nous les percevons comme des excisions quand il s’agit d’autres cultures. Pourquoi les acceptons-nous encore sur les enfants intersexes ? » Avec son amendement, Raphaël Gérard espère interdire définitivement ces dérives et permettre aux enfants nés intersexes d’avoir recours à la justice contre les médecins qui les auraient opérés sans qu’ils y consentent.